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Titre du blog : Histoire générale de l'Afrique avec Moncef Mzabi
Auteur : moncefmzabi
Date de création : 28-06-2011
 
posté le 17-08-2011 à 17:11:41

La démographie et les mouvements de populations

Au début du XIXème siècle, les peuples africains formaient des groupes culturels et linguistiques distincts, occupant chacun un territoire délimité. Dans la plupart des régions d'Afrique, le processus d'identification culturel était achevé au XVIème siècle, mais certaines parties de l'Afrique orientale (mis à part le plateau central de la région des Grands Lacs) et Madagascar connurent encore aux XVIIème et XVIIIème siècles de vastes migrations de populations vers des zones relativement peu peuplées. Vers 1800, néanmoins, la région était parvenue à la stabilité.

Si l'on peut dire que les migrations, au sens de grands déplacements mettant en mouvement un grand nombre de personnes sur de larges portions du sol africain, avaient pris fin au début du XIXème siècle, les habitants n'en continuaient pas moins à se déplacer au gré des exigences de leurs occupations. Certains, par exemple, étaient des éleveurs en quête de pâturages, ou des commerçants professionnels et des artisans spécialisés couvrant de grandes distances et fondant des colonies en poursuivant leurs occupations ou bien encore des chassuers parcourant certaines régions à la poursuite du gibier. Ces mouvements n'impliquaient pas l'abandon définitif d'une demeure ou le déplacement d'une population. C'était un flux régulier de population dans des zones généralement bien déterminées. Cependant, certains événements, tels qu'une sécheresse ou une épidémie prolongées, une guerre ou l'effondrement d'un Etat existant, ou une pression excessive sur les terres due à la surpopulation, pouvaient entraîner des mouvements amenant des populations à quitter définitivement leurs foyers. Les exemples abondent, au XIXème siècle, de mouvements de ce type, comme celui des Fang dans la zone des forêts équatoriales, celui des Chokwe de l'Angola, celui des Yoruba de l'ancien Oyo et, en Afrique australe, le mouvement Mfecane qui se prosuisit au Natal parmi les Nguni du Nord.

On estime qu'avant 1800 la population globale de l'Afrique n'avait pas pu augmenter beaucoup et que l'excédent annuel des naissances par rapport aux décès aurait été de l'ordre de 50 pour dix mille habitants. A ce taux, une population doublerait en l'espace de mille ans. Cette estimation apparaît justifiée dans le cas de l'Afrique du Nord où les poussées démographiques que pouvaient provoquer l'agriculture intensive et l'irrigation étaient contre-balancées par des épidémies et des périodes de sécheresse. Mais, dans le cas des zones herbagères et forestières de l'Afrique occidentale,  centrale et méridionale, les systèmes d'agriculture développés (agriculture souvent combinée à l'élevage sur les terres à pâture) ont entraîné un accroissement de population et de fortes densités dans certaines zones comme le pays igbo (ibo) dans le sud-est du Nigeria, les herbages du Cameroun et la réhion des Grands Lacs en Afrique de l'Est. Cependant, dans ces régions, et surtout dans l'ouest et le centre-ouest de l'Afrique aux XVIIème et XVIIIème siècles, la croissance démographique a gravement pâti de la traite des esclaves. Il est vrai que ses effets furent inégalement répartis. Certains Etats semblent avoir profité de la traite pour se renfocer aux dépens de leur voisins. Les Etats les plus faibles, incapables de se défendre, furent ceux qui souffrirent le plus de la dévastation et du dépeuplement dont les effets sont encore sensibles aujourd'hui. Beaucoup abandonnèrent leurs foyers dans les plaines fertiles, et les poplationsqui restaient s'efforcèrent de subvenir tant bien que mal à leurs besoins dans des rgions accidentées et peu hospitalières.

Les effets généraux du dépeuplement causé par la traite des esclaves furent catastrophiques pour toute l'Afrique. Entre 1650 et 1850, la population totale de l'Afrique a diminué, et le piètre fonctionnement des économies africaines au début du XIXème siècle a été en grande partie la conséquence de ce dépeuplement. Les Etats forts eux-mêmes, qui semblaient avoir atteint un apogée et avaient connu de nouveaux dévelopements internes, furent retardés dans leur évolution par l'appauvrissement de leurs voisins. La traite expliquerait ainsi la fragilité des systèmes étatiques en Afrique au début du XIXème siècle, de mâme que l'instabilité et la vulnérabilité des structures politiques et économiques. La croissance démographique au XIXème siècle n'a pas été spettaculaire parce que la campagne d'abolition de la traite a été longue à produire ses effets. Ce n'est qu'à partir de 1850 que le nombre des esclaves exportés outre-Atlantique a été sensiblement réduit. Pendant ce temps, la traite vers Zanzibar et l'océan Indien augmentait. En outre, l'essor des produits d'exportation de substitution, comme l'huile de palme, le caoutchouc et l'ivoire, augmentait la demande interne de main-d'oeuvre servile employée à l'obtention et au transport jusqu'à la côte des nouveaux produits d'exportation.  L'esclavage intérieur a donc terriblement progressé au XIXème siècle, avec son cortège de pertes occasionnées par les guerres et les razzias destinées à capturer des esclaves. Lorsque la traite des esclaves à destination des pays d'outre-mer fut finalement abolie, la population totale de l'Afrique commença à augmenter pour la première fois depuis le XVIIème siècle. Elle dimina de nouveau sous l'effet de l'mposotion du régime colonial et des guerres de résistance, pour se remettre à croître, lentement d'abord, puis fortement à partir des années 1930.